Quand la vigne soigne aussi la peau : l’innovation cosmétique par Sarmance selon B. Bellet

La richesse en polyphénols de certaines vignes en biodynamie peut atteindre des taux trois fois supérieurs à ceux d’autres végétaux. C’est ce qu’ont montré les analyses menées au lancement de Sarmance avec l’École supérieure d’agriculture d’Angers.
À l’origine de Sarmance, il y a une intuition : la vigne peut nourrir la peau autant que le palais. Comment est née cette idée ?
Je viens du secteur du tourisme, mon associé, Jérôme Bretaudeau, est vigneron. On s’est rencontrés lors d’actions de promotion du territoire nantais. L’idée a émergé en 2013, avec cette intuition commune : la vigne est un végétal plein de ressources. On a donc décidé de mener des analyses pour évaluer la richesse en polyphénols de certaines vignes en biodynamie. L’objectif était de développer une gamme cosmétique à destination de l’hôtellerie-restauration. Les résultats ont été très positifs, et c’est ainsi que Sarmance est née.
Quels types de coproduits de la vigne utilisez-vous, et quels sont leurs effets reconnus ?
Nous utilisons plusieurs extraits du végétal vigne : la sève, récoltée au printemps, a des propriétés éclaircissantes sur les tâches pigmentaires. Les apex (jeunes pousses), prélevés au solstice d’été, sont riches en antioxydants. Ces extraits sont distillés sans solvant pour produire un hydrolat, ou eau florale. On valorise aussi le pépin de raisin, utilisé en gommage. Ce travail s’inscrit dans une logique de diversification agricole et de bioéconomie : on exploite autrement une matière déjà présente.
Vous revendiquez une efficacité prouvée. Quelles démarches scientifiques ou protocoles suivez-vous pour valider vos formulations ?
Dès le départ, nous avons travaillé avec l’ESA, qui a mesuré la teneur en polyphénols dans nos extraits. Cela nous a permis d’objectiver l’efficacité antioxydante. Aujourd’hui, nous sommes davantage dans la phase industrielle, mais cette première étape a posé les bases scientifiques. Nos produits sont aussi testés en termes de satisfaction et de tolérance, via des protocoles standards en cosmétologie.
Travailler à partir de ressources agricoles, c’est aussi faire face à des variabilités naturelles. Comment garantissez-vous la stabilité et la qualité des principes actifs ?
C’est un véritable enjeu. Le climat change : gelées printanières, sécheresses estivales… Pour préserver la qualité de la matière première, on a mis en place des systèmes de protection, comme des bougies ou des fils chauffants. La récolte de la sève et des jeunes pousses suit un calendrier précis pour assurer une concentration optimale en actifs.
Vous êtes ancrés dans des territoires viticoles précis. En quoi votre modèle s’inscrit-il dans une logique de développement local ou de relocalisation ?
Nous travaillons avec des vignes en Loire-Atlantique, en Champagne, en Corse et en Savoie. L’idée est de valoriser localement les ressources : circuit court, contenants produits dans la Plastics Vallée, fabrication made in France. On collabore aussi avec le pôle de compétitivité Végépolis, autour d’Angers. C’est une volonté forte : créer de la valeur sur les territoires, travailler en circuit court, et être cohérent avec notre démarche bio.
Avez-vous déjà travaillé avec des chercheurs ou laboratoires académiques ? Et si oui, pour quels objectifs ?
Oui, comme mentionné, on a travaillé avec le laboratoire GRAPPE de l’ESA dès le début. Cela nous a permis de poser les bases scientifiques du projet, de mesurer la présence des actifs, de valider les premières formulations. Ce partenariat a été déterminant. Aujourd’hui, nous n’avons plus de collaboration active, mais nous restons ouverts à des projets futurs, notamment en lien avec des vignes de Savoie.
Comment voyez-vous l’évolution du lien entre cosmétique, agriculture et innovation scientifique dans les années à venir ?
Il y a une convergence de plus en plus forte. L’agriculture fournit des actifs puissants, la recherche permet de les caractériser, la cosmétique les valorise. Mais cela demande rigueur et ancrage. Pour répondre aux attentes sociétales (santé, environnement, circuit court), il faut croiser les compétences. C’est ce que nous essayons de faire chez Sarmance, à notre échelle.

Benjamin Bellet, co-fondateur de SARMANCE
―@benjaminbellet